Pourquoi le cloud est un problème
L’essor des systèmes basés sur le cloud a accéléré l’adoption des solutions biométriques. En stockant de grandes quantités de données à distance, les plateformes cloud permettent une évolutivité et des mises à jour système plus faciles. Cependant, les violations de données à grande échelle et l’accès non autorisé à des informations personnelles ont alimenté le scepticisme du public. Selon l’enquête « Customer data privacy and security » de Deloitte en 2023, 67 % des consommateurs craignent que leurs données biométriques puissent être utilisées à mauvais escient si elles sont stockées dans le cloud. Cette inquiétude est particulièrement marquée dans les régions ayant des lois strictes sur la confidentialité, comme l'Union Européenne avec le Règlement Général sur la Protection des Données (RGPD).
Les tensions géopolitiques augmentent également les risques. Des environnements critiques comme les aéroports, les installations militaires et les centrales nucléaires ne peuvent se permettre des vulnérabilités dans leurs systèmes d’accès. En réalité, ces sites représentent une mine d’or pour les hackers. Ils peuvent intercepter des données biométriques précieuses et commettre des crimes graves, tels que manipuler des élections, espionner des nations ennemies, usurper des identités ou saboter des systèmes sensibles. Ce sont des actions irréversibles, aux conséquences potentiellement dramatiques.
Passer au stockage localisé
Les systèmes biométriques qui privilégient le calcul en périphérie offrent une solution. Plutôt que d’envoyer les données vers le cloud, l’information biométrique est traitée et stockée localement sur des dispositifs sécurisés ou des cartes intelligentes. Ces systèmes suppriment le besoin de transmettre des données sur des réseaux, réduisant ainsi considérablement le risque de piratage.
Par exemple, des cartes intelligentes contenant des données biométriques permettent aux utilisateurs d'authentifier leur identité sans avoir à interagir avec le cloud. Cette approche décentralisée renforce la confidentialité, car les données restent sous le contrôle de l'utilisateur et sont moins susceptibles de tomber entre les mains des cybercriminels. Elle respecte également les cadres éthiques et légaux en offrant aux utilisateurs l’autonomie sur leurs informations personnelles.
Sécuriser stratégiquement les environnements à haut risque
Les secteurs manipulant des matériaux ou informations sensibles — tels que la pharmacie, l’énergie et la défense — exigent des niveaux de sécurité d’accès très élevés. Les systèmes traditionnels, comme les cartes magnétiques ou les codes PIN, ne suffisent pas à empêcher un accès non autorisé. La biométrie offre une alternative fiable à la stratégie adoptée par ces industries à haut risque, mais uniquement si elle est mise en œuvre sans introduire de nouvelles vulnérabilités.
Certaines organisations ont déjà déployé des solutions biométriques sur site qui traitent les données dans un environnement clos, garantissant que les informations sensibles ne quittent jamais les installations. Par exemple, les centrales nucléaires utilisent de plus en plus des systèmes biométriques multimodaux stockés localement (par exemple, combinant empreintes digitales et scans de l’iris) pour renforcer les contrôles d’accès. De même, l’armée et les institutions financières adoptent des technologies innovantes telles que l’utilisation de cartes intelligentes biométriques : les données personnelles sont stockées exclusivement sur la carte, sans avoir recours au cloud ou à des serveurs externes. Cela réduit non seulement le risque de fuite de données, mais garantit également une conformité stricte au RGPD en assurant une gestion locale et sécurisée des données personnelles.
Défis et perspectives
Malgré ses avantages, la sécurité biométrique localisée fait face à des défis, notamment parce que les dispositifs locaux doivent être suffisamment robustes pour prévenir toute tentative de manipulation ou intrusion cybernétique.
Pour surmonter ces obstacles, les fabricants investissent dans des techniques de cryptage avancées et du matériel résistant aux altérations. L’utilisation de modèles biométriques — des représentations mathématiques des données biométriques plutôt que des images brutes — permet également de réduire les risques. Ces modèles ne peuvent pas être reconvertis en données originales, protégeant ainsi davantage la vie privée des utilisateurs.
À l’avenir, les systèmes biométriques devront trouver un équilibre entre commodité, sécurité et responsabilité éthique. En s’éloignant de la dépendance au cloud, les organisations pourront restaurer la confiance du public tout en sécurisant les environnements critiques.
Finalement, pour réaliser pleinement le potentiel des systèmes biométriques localisés, l’industrie doit se concerter pour établir des normes et des bonnes pratiques. Il ne s’agit pas seulement d’un changement technologique, mais d’une nécessité éthique et stratégique pour restaurer la confiance et protéger les environnements sensibles.
L’avenir de la sécurité d’accès ne réside pas dans des technologies centralisées comme le cloud, mais dans la capacité à donner aux individus le contrôle sur leurs propres données. La question n’est pas de savoir si les industries peuvent s’adapter à cette évolution éthique, mais combien de temps elles mettront à adopter ce changement.